Carnet de bord 2021, semaine 2 17 janvier 2021 – Publié dans : Carnet de bord – Mots-clés : juliette cortese, Laurent Grisel, Maurice Maeterlinck, michel torres, romain fustier
publie.net, le feuilleton (que le monde du livre nous envie) à retrouver chaque semaine, par GV.
lundi
Termites encore. C'est assez dingue la façon dont l'OCR va aller couper dans le texte scanné des bribes de sens pour, par le plus grand des hasards (ou pas), le ressortir de façon à ce que la phrase tienne syntaxiquement. Par exemple ici, la phrase n'était pas Ils représentent l’espoir, le luxe démentiel, la joie tueuse d’une cité sépulcrale qui n’a pas d’issue vers l’amour et le ciel mais Ils représentent l’espoir, le luxe démentiel, la joie voluptueuse d’une cité sépulcrale qui n’a pas d’autre issue vers l’amour et le ciel. Un peu plus loin : l'amour a ses promesses VS l’amour a trahi ses promesses. Etc. Avant retour à la deuxième édition de Climats, dernière relecture du texte avant dépôt chez l'imprimeur pour les épreuves. Mais d'abord, je dois en réécrire la quatrième et m'imprégner de ses boucles et de ses flux, pour schématiser me mettre en situation d'osciller sur la brèche, comme nous tous à l'heure venue du verdict (et du vertige) climatique :
le point de basculement, de non-retour
l’irréversibilité
qu’est-ce que l’expérience de l’irréversibilité ?
un seuil d’irréversibilité: qu’est-ce ? que ressent-on
quand on le franchit
Et du climat retour à l'envoyeur des termites, par l'entremise des pensées de Maeterlinck :
Savons-nous si le bouleversement des climats, aux époques géologiques, alors qu’ils habitaient le nord de l’Europe, puisqu’on retrouve leurs traces en Angleterre, en Allemagne et en Suisse, ne les a pas obligés de s’adapter à l’existence souterraine qui, graduellement, amena l’atrophie de leurs yeux et la cécité monstrueuse de la plupart d’entre eux ? La même épreuve ne nous attend-elle pas dans quelques millénaires, quand nous aurons à nous réfugier aux entrailles de la terre afin d’y rechercher un reste de chaleur ; et qui nous dit que nous la surmonterons aussi ingénieusement, aussi victorieusement qu’ils l’ont fait.
Le problème, c'est que lorsque l'on décidera d'émigrer sous la terre pour échapper aux ravages des bouleversements climatiques, on réalisera qu'on y a déjà enfoui nos déchets nucléaires...
mardi
Oh, presque trois fois rien. J'attends une livraison Chronopost pour envoyer les épreuves de Jusqu'à très loin dans la foulée afin que tout parte aujourd'hui et qu'on ne perde pas de temps. À force d'être focalisé sur cette non-perte de temps j'en profite comme le veut le lexique capitaliste primaire pour préparer un colis qui partira également ce matin (la Poste n'est ouverte que le matin ici). Mon colis est prêt, il n'y a plus qu'à réceptionner ma livraison et ce sera bon. Le livreur Chronopost est exactement au mitan de son créneau, comme souvent, et comme souvent désormais, distanciation oblige, il remplace la signature sur son terminal par une photo du colis dans l'ouverture de la porte comme preuve à la livraison (ça pourrait être n'importe quelle porte et n'importe quel colis, mais n'entrons pas sur le terrain miné des process d'entreprises, s'il vous plaît). Me voilà libre d'aller donc à la Poste pour envoyer tout ça et faire d'une pierre deux coups, gagner du temps donc. Sauf que j'oublie d'ouvrir mon carton, ne pars poster que mon colis et pas mes épreuves, qui elles doivent être envoyées en lettre verte, et voilà que j'aurais à refaire exactement le même trajet dans l'après-midi pour effectivement les faire partir à temps avant la levée. J'aurais donc perdu du temps à force de vouloir en gagner. Ou pas : entre-temps (!), expédier aussi une commande du site tombée dans la journée pour tâcher de regagner ce que j'avais perdu. Presque trois fois rien, donc. Mais comme je le lis en reprenant justement les épreuves de Jusqu'à très loin : presque trois fois rien ce [n'est] pas rien.
mercredi
Trois propositions de couverture pour un même Lent séisme ; nous débattons à trois (Roxane, Juliette et moi). L'idée, c'est de mesurer les écarts entre l'idée que l'on se fait du livre en voyant la couverture et le livre lui-même. Il y a un problème avec le PDF annoté que j'ai renvoyé semaine dernière pour Perdre Claire : les surlignements sont là mais les commentaires non, du moins via Aperçu sous Mac. Les commentaires n'apparaissent que dans Adobe, c'est encore la joie des incompatibilités matérielles à l'œuvre. J'avais opté pour une relecture sur le PDF pour éviter que les allées-venues d'un fichier sur X traitements de texte en viennent à bousculer à force le formatage, d'autant que nous sommes quatre à intervenir. Qu'un autre problème survienne avec un PDF n'est pas nécessairement une surprise, simplement le signe que la technique est toujours un frein quand elle est (aussi) un accélérateur de productivité (sic) en même temps (sic sic). Nous en passerons donc par une étape intermédiaire dans le cloud pour éviter qu'Aperçu nous pèse, ce qui est une drôle de phrase quand on y réfléchit bien.
jeudi
Manifestement, chaque semaine est partie pour abriter au moins un jour dans son écoulement où rien ne s'enclenche correctement, où tout rate microscopiquement sa cible. Au fond, ça n'a aucune importance. Mais enfin c'est étonnant. Et étrange. Par exemple, comment se fait-il que, mais enfin ça il vaudrait mieux pour moi le taire ici, ça n'a pas vocation à être communiqué... Ou encore, mais c'est juste aberrant de passer autant de temps à, mais à présent quel intérêt à mentionner de pareilles choses dans un carnet de bord ? Et ne parlons pas non plus de, eh bien, donc, non, n'en parlons pas. Nous nous en remettrons donc pour cette fois au silence, et qui sait cela aidera-t-il peut-être à trouver des solutions à nos menues misères.
vendredi
Cela faisait combien de temps qu'on ne s'était plus vus tous les trois avec Roxane et Philippe ? Pas vus en présentiel, attention, restons sérieux. Se voir en visio. Se voir IRL, ça remonte encore à plus, mais je ne sais même plus quand. Donc nous nous voyons (après avoir passé les indispensables moments où, techniquement, on ne se voit pas, avant que tout se règle, nous sommes comme partout soumis aux désidératas des câbles). Nous voilà donc à refaire l'année avant qu'elle advienne (où on va, comment, pourquoi, dans quel état errer, etc.), à faire le point sur les retours d'Amazon et nos démarches actuelles avec Hachette et LSF pour tenter de les enrayer (pour le tableau proposé par Philippe, Les danaïdes de publie.net remplissant le tonneau d'Amazon, voir ci-dessus la version de Waterhouse). Bref, on avance (bien que comme le veut la fameuse formule des braqueurs de banque personne ne bouge). Pendant la visio, je rate un appel de Michel Torres, que je finirai par avoir dans le courant de l'après-midi et avec qui j'échange sur la situation sanitaire absurde qui est la nôtre (pléonasme) et qui enraye quelque peu notre action au quotidien (mais n'entache pas notre enthousiasme pour autant). Voilà ce qu'il me répond : le problème, en ce moment, c'est l'ambiance. D'accord, c'est mieux que la mort mais c'est CHIANT. Ce sera le mot de la fin cette semaine.