On fait des trucs étranges. Publier trois livres, ceux-là spécifiquement, et les projeter dans l'arène de la rentrée littéraire pour entrer en compétition avec d'autres, c'est étrange. À moins que ce soit précisément le contraire, et que de faire concourir entre eux des livres les uns non pas avec les autres mais contre, c'est cela qui soit étrange. Il ne nous appartient pas de le dire. L'étrangeté est partout quand on y pense. Et on y pense beaucoup.
Par exemple, on ne sait jamais où on se trouve dans Au canal. Dans quel monde. Dans quel rêve. Ni si c'est un cauchemar, un récit, une enquête. C'est un roman qui tourne autour de tout ça à la fois et qui subvertit tous les genres qu'il traverse. En allant au canal, entre les chapitres de Marie-Laure Hurault et les collages photographiques (étranges, eux aussi) de Frédéric Khodja, tout en frayant avec les codes du polar, comme l'écrit Eric Pessan (voir ci-dessous), on part en quête de la source de l'espace lui-même. N'est-ce pas la plus belle ambition qui soit quand on se livre corps et âme à la lecture ? La bonne nouvelle dans l'histoire, c'est que vous pourrez le découvrir par vous-même et vous plonger à votre tour dans ce voyage : le livre paraît aujourd'hui même, et c'est le premier temps de notre rentrée.
Le deuxième aura lieu le 4 septembre et l'ambiance sera garantie. Je veux dire, c'est le titre du livre, pas une expérience marketing de notre part. Ambiance garantie est le premier roman de Xavier Briend et on peut dire qu'il ressemble à Pulp Fiction (pour le découpage narratif) et à Fargo (pour l'art du quiproquo) à la fois. Étrange, pas vrai ? C'est surtout un roman éminemment drôle, qui voit se croiser toute une galerie de personnages hauts en couleur, tous en quête de quelque chose (mais quoi ?). Voir comment ils se cherchent, ils se sondent, ils s'évitent, ils se ratent, parfois même se désirent, c'est un régal. Et à voir s'étendre ou s'amenuiser l'espace entre toutes ces figures qui cherchent à se rapprocher sans savoir trop comment, on se dit que la complexité de notre époque est la plus belle source de fiction qui soit.
Dernier temps de notre rentrée : un Paysage augmenté. Ce serait un cliché d'éditeur de dire ici qu'il s'agit d'un OVNI. Il serait faux de prétendre qu'il s'agit d'un roman graphique. C'est un roman graphique (saisissez la nuance) qui met aussi l'espace au centre de son réseau de représentations. La matière première de ce livre, ce sont les collages poétiques de Mathilde Roux qui parviennent à réinventer le territoire à partir de la carte et qui dessinent les contours d'un continent étrange, là encore. Littéralement par dessus, Virginie Gautier a concocté un récit, poétique lui aussi, de voyage. Nous sommes en quête de quelque chose mais quoi ? Éléments de réponse dans le livre, qui est bien plus encore, tant au niveau de la langue que de l'image ou de l'objet, et qui se joue des genres comme des frontières (poésie, récit de voyage, roman d'anticipation, tout cela à la fois ?). C'est, surtout, un livre pour vous.
Les trois en définitive. Un même espace, trois représentations, trois quêtes divergentes, trois étrangetés propres. Rares. De quoi faire de notre rentrée, tout du moins on l'espère, autre chose qu'un genre de jeu du cirque éditorial et médiatique. Un (en)jeu de lecture(s) ?
Bonne rentrée à vous,
Toute l'équipe publie.net
Notre rentrée
À la lisière des forêts, à la surface des eaux, [un] roman qui fait perdre ses repères au lecteur. À travers une magnifique langue. Librairie Michel Descours (Lyon)Une écriture du désastre et de la chute. Yasmina Mahdi, Le capital des motsJ'ai retrouvé dans ce livre cette densité du hors-champs, les ombres portées, et le jeu - en définitive - avec les conventions romanesques, que l'on connait dans les romans de Blanchot.
Le 14 septembre à 17h à la librairie Michel Descours à Lyon, rencontre avec Marie-Laure Hurault et Frédéric Khodja animée par Gwilherm Perthuis, suivie d'une signature.
Revue de presse
Alger céleste
[Katia Bouchoueva] se balade en «ballerine»
entre les langues et les territoires de sa propre cartographie.