Un texte/Une voix — Légendes/Daniel Bourrion 17 novembre 2013 – Publié dans : Un texte/Une voix – Mots-clés : 19 francs, Cantique de la paranoïa, Cette ville n'existe pas, Daniel Bourrion, En ce soir, Incipit, j'ai été robert smith, Jean Echenoz, L'Occupation des sols, La petite fille dans sa robe claire, Langue, Légendes, Litanie, Olivier Toussaint, Trois quatre-vingts
[read_later_buttons kindle instapaper pocket readlater]
Aujourd’hui, c'est Daniel Bourrion qui répond à nos trois questions, à propos de Légendes, chose qui n'était pas simple, puisque Légendes regroupe plusieurs textes de l'auteur. Il y réussit pourtant parfaitement. Lisez plutôt :
Quelle est la phrase/anecdote/situation qui déclenche l’écriture de Légendes ?
Légendes est une « compilation » qui rassemble plusieurs textes courts qui font sens ensemble (aux éventuels lectrices et lecteurs de chercher lequel), et les déclencheurs sont donc multiples. Si on prend les textes dans l'ordre d'apparition à l'écran, cela donne :
- Langue : la première phrase arrive toute seule dans le train qui me ramène de Lorraine, où j'ai passé les presque 40 premières années de ma petite vie. Je suis assis, j'entends un des passagers parler en français, je me dis en mon for intérieur "Cette langue n'est pas ma langue" et c'est une vérité. C'est ce que raconte Langue, car ma langue maternelle est un patois lorrain germanique, le Platt – j'ai appris la langue française à l'école des bonnes sœurs à l'âge de 3 ans ;
- Litanie : un souvenir qui remonte d'une pièce, du corbillard qui était utilisé dans le village de mon enfance pour transporter les morts (c'est le premier paragraphe du texte). Ensuite, il suffit de dérouler les souvenirs, et le fait d'avoir été servant de messe aide forcément...
- La petite fille dans sa robe claire : le déclencheur est une photographie qu'on me donne, et qui est maintenant sur mon bureau, juste là. Le texte décrit la photo, ce qu'elle représente, et ma surprise, en fait, quand j'ai compris qui était sur la photo (je le dis tout à la fin) ;
- 19 francs : Je lis quelque part un papier sur Echenoz et comme à chaque fois, je pense à son "Occupation des sols", à comment j'ai acheté ce livre, au chemin parcouru depuis – des petits riens, en somme, mais plein de petites choses qui finissent par faire les textes, et nous avec ;
- Trois quatre-vingts : après 19 francs, que j'envoie au libraire dont il est question et à, évidemment, Jean Echenoz, je reçois une réponse très gentille des deux. Je manque tomber de ma chaise, et je me dis qu'il serait temps, quand même, de relire L'Occupation des sols, pas rouvert depuis que j'ai été étudiant (ça date). Trois quatre-vingts raconte comment je n'ai pas relu L'Occupation des sols, et pourquoi (je ne l'ai toujours pas relu, d'ailleurs, et je pense ne jamais le relire).
Si Légendes était une personne ou un personnage, qui serait-il ?
Hum... l'auteur (oui, c'est très présomptueux, mais je ne vois rien d'autre à dire, désolé).
Quel passage/mot/extrait de Légendes vous tient le plus à cœur et pourquoi ?
Il y en a plusieurs.
La toute dernière phrase de « La petite fille » me touche particulièrement, mais ça semble évident quand on lit ce texte.
J'aime aussi la première phrase de Langue parce qu'elle résume une des problématiques (dans laquelle j'essaie de ne pas entrer de manière intellectuelle, ce serait la plus mauvaise manière de faire, je crois) à laquelle je suis confronté au quotidien et tout particulièrement, dès que j'attaque un morceau de texte : qu'est-ce que c'est qu'écrire, et comment faire, et avec quels mots, quand la langue qu'on emploie est de fait une langue étrangère (c'est toujours le cas pour quelqu'un qui écrit, je pense – je ne détaille pas, surtout parce que je n'ai jamais verbalisé ces questions de manière claire, et pour ne pas devenir emmerdant, mais c'est là, toujours).
Sinon, d'autres passages m'accrochent parfois, au hasard du moment, mais seulement les bons jours, quand je n'ai pas envie de tout jeter à la poubelle : on n'est jamais assez exigeant avec soi-même.
Vous en saurez plus sur cet homme, qui n'hésite pas à dire J'ai été Robert Smith,
en lisant sa page auteur ainsi que d'autres textes comme
Cantique de la paranoïa, Incipit, Cette ville n'existe pas, En ce soir et Chemins (en co-écriture avec Olivier Toussaint),
-son fil Twitter : @dbourrion
-son site : Face Ecran