Carnet de bord 2020, semaine 17 26 avril 2020 – Publié dans : Notre actualité – Mots-clés : , , ,

publie.net, (le retour du) feuilleton, à retrouver chaque semaine, par GV

lundi

Il y a beaucoup de mails non lus à écrémer, lire, reclasser (sans oublier d'y répondre parfois). Il y a aussi un rendez-vous fixé à seize heures pour se voir en visio à quatre, Roxane, Julie, Philippe et moi. Il existe une photo, du moins une capture d'écran, pour en témoigner : pour la première fois depuis bien longtemps, nous sommes ensemble (tout en ne l'étant pas) ; nous nous voyons. Nous nous parlerons même. Nous avons même un ordre du jour ! Et nous prenons des notes. Preuve que nous sommes au taquet. Il faut réorganiser les semaines à venir : je veux dire, notre vision des semaines à venir. C'est toujours tangent car au fond, on ne sait pas grand chose, comme tout le monde. Les librairies vont-elles ouvrir ? En Italie, oui. Oui mais en France ? En France, c'est le 11 mai. Oui mais quoi le 11 mai ? On ne sait pas. En France, c'est le 11 mai et c'est tout. Il faut sans doute l'entendre comme un slogan (publicitaire, de campagne ?) voilà tout. Débrouille-toi avec ça. En réalité, tous les points que nous aborderons génèrent une quantité de micro-points qui découlent d'eux, par exemple : oui mais si nous faisons ça en A, que faire en A', etc. La question, c'est surtout de maintenir notre programme de parutions déjà chamboulé par le confinement (les parutions d'avril décalées à mai) pour ne pas que tout soit répercurté ensuite sur le second semestre, puis sur 2021. Tout le monde est dans la même situation. Certains éditeurs ont même d'office reporté 2020 à 2021 (ce qui nous place de fait dans une zone temporelle incertaine : les limbes ou la quatrième dimension ?). Nous non. Il y a des livres qui sont en stand by et qui ne demandent qu'à exister, sans compter ceux qui ont eu le malheur de paraître quelques jours avant le confinement, ou ceux qui, sortis en début d'année, n'ont pas vécu autant qu'ils auraient dû. Pour ceux qui viennent, existeront-ils si nous les libérons avant que les librairies rouvrent ? Le souci, c'est que jusqu'à présent nous avions adapté notre comportement à la situation, dans l'idée que cette situation était circonscrite dans le temps (quelques semaines, voire quelques mois). Mais que faire si l'anormalité dure encore un an ? Plus encore ? Il faut que nous soyons en capacité de travailler, et de concevoir des livres, et ces livres les proposer au public. Que ce soit sous forme numérique (c'est déjà le cas bien sûr), ou papier quand les libraires rouvriront. Et avant en ce qui concerne la vente directe via notre imprimeur, dont nous avons pu constater qu'il était le plus safe possible pour quiconque et respectueux des gestes barrière. Je ne sais pas si c'est idéal, je veux dire par là que je ne sais pas si le mot idéal a encore du sens, mais c'est ce sur quoi nous nous sommes retrouvés aujourd'hui.

mardi

Je reçois des livres non lecturés. C'est incorrect. Je sais bien combien c'est incorrect, oui mais la phrase est venue ainsi. En réalité c'est faux : j'ai reçu ces livres, des épreuves (quatre) il y a plusieurs jours. Là, je les regarde. Ce sont des livres non encore parus (mai, juin, août, septembre prochains respectivement ?), relus mais non relus assez, et dont la parution est flottante, compte tenu de la situation présente (cf. précédent paragraphe). Ces livres sont donc pour l'heure non lus (logiques, ils ne sont pas parus) bien que l'ayant été (durant le travail sur le texte, durant les corrections sur les premières épreuves numériques) mais pas encore suffisamment (relectures sur l'épreuve papier) et on ne sait pas encore précisément quand ils verront le jour, donc quand ils seront en situation d'être lus. Là mais non là. Lus mais non lus. Quantiques, quand même. Non absent mais pas encore en présence de leurs lecteurs. Non lecturés. Mais avant de lire, il faut dire. Communiquer à nos lecteurs le redéploiement du calendrier décidé hier, la rouverture des ventes directes de livres papier sur le site, avec un passage aux frais de port à 1€ pour les accompagner. D'ordinaire, une newsletter, du moins son écriture, je l'étale sur plusieurs jours, au moins deux, pour avoir du recul. Là, il faudrait que ça parte ce soir (ce sera le cas). Les auteur.e.s eux (elles) sont ok avec l'idée de ces parutions. C'était important aussi qu'on puisse le décider ensemble. Et c'est lancé.

 

mercredi

Surprise, nous avons vendu un livre en librairie. Deux en tout sur avril. C'est l'opulence ! Non, ce livre d'aujourd'hui, c'est la Fnac. Philippe : avec leur prêt garanti par l'État de 500 millions d'euros, ils auraient pu en acheter deux. Fort heureusement, le numérique marche fort ce mois-ci. Certes, ça ne compense pas le (sic sic) manque à gagner papier, mais enfin c'est loin d'être négligeable. Une partie de ma journée sur des présentations de livres pour les dossiers de presse que prépare Roxane. C'est beau, c'est fun, c'est précis. On avait arrêté d'en faire, faute d'intérêt les concernant. Dans le contexte actuel qui impliquera de beaucoup opter pour des envois presse numérique, ça a du sens d'y revenir. Et ça correspond bien aux livres un peu atypiques qui arrivent : Des étés Camembert avec ses illustrations, le Journal du Brise-lames avec son jeu vidéo, les Oloés avec ses autrices et auteurs invités. Dans l'écriture, j'ai parfois la sensation d'écrire des chroniques de ces livres à la place de celles et ceux dont nous souhaiterions qu'ils le fassent. Ce serait assez triste de s'imaginer (le fais-je ?) que c'est précisément ce qu'ils attendent.

jeudi

Avec Julie, lors de notre point téléphonique, nous évoquons l'après 11 mai. On ne sait pas encore si cette date marquera une réouverture des librairies, et si oui comment. Sens de déplacement dans le magasin ? Parois pour protéger les libraires en caisses ? Gel, masques ? Tout est flou, et en réalité personne ne sait. Ceci étant, on imagine beaucoup, et on sent que, derrière, la machine est prête à se remettre en marche (distribution, livraisons, retours, facturation). Une incertitude parmi d'autres s'agissant de la rentrée prochaine : comment les représentants, qui d'ordinaire passent de librairie en librairie pour présenter les catalogues d'éditeurs, vont-ils pouvoir faire leur travail dans ces conditions ? Mailing, phoning, visio ? Là encore, c'est de la fiction. La même fiction qu'on peut trouver dans les articles (très) grand public de la presse en ce moment : le livre numérique, figurez-vous que "c'est un vrai livre", en fait. Et qu'en avril, les ventes de livre se sont effondrées. J'ai envie de dire, ça alors. Fort heureusement, je ne le dis pas (je l'écris, c'est pire). Pendant ce temps, Manon qui a commencé hier ses envois de relevés de droits d'auteurs poursuit ses envois de mails. Cette année, pas de paiement par chèque pour cause d'empreintes digitales. Uniquement par virement, avec des gants.

 

vendredi

Trouver des pistes presse, c'est à la fois facile et pas facile. Bien sûr, nous avons une liste à nous de chroniqueurs et journalistes que nous sollicitons (pas toujours les mêmes pour chaque livre, mais enfin des relais communs, qui domptent ensemble des énergies communes). Avec chaque nouvelle parution, nous essayons également d'élargir nos cercles. Nos parutions atypiques à venir (les illustrations, le jeu vidéo, les oloés) font qu'on ne se fait pas de souci sur l'angle d'attaque pour ces lecteurs dans leurs recensions. Mais dans certains domaines (par exemple : qui contacter et comment sur la partie jeu vidéo du Journal du brise-lames ?), on a forcément moins de repères que d'autres. Alors on cherche. On se consulte. On part à la pêche aux inspirations. On se partage des fichiers avec Stéphane Gantelet, le concepteur du jeu.