Carnet de bord, semaine 51 22 décembre 2019 – Publié dans : Carnet de bord – Mots-clés : , ,

publie.net, le feuilleton, à retrouver chaque semaine, par GV.

lundi

Notre affiche-catalogue à la librairie Le Square, à Lourdes (merci Julie et Stéphane !)

C'est le retour des oloé. Ces espaces élastiques où lire où écrire inventés par Anne Savelli dans un livre numérique (à l'époque chez D-Fiction) et que nous nous apprêtons à rééditer et à prolonger : ce sera au printemps. Pour travailler sur cette nouvelle version des oloé, pleine de surprises (suspens), il me faut moi-même trouver un oloé adéquat. Un oloé adéquat, et un outil adéquat. Tout doit être adéquat. Pour lire écrire, il faut être bien. Intérieurement, physiquement. Pour travailler sur un texte aussi. Le temps de cerveau disponible que TF1 entend vendre à Coca-Cola, il est ici crucial. Mais non vendu à quiconque. C'est un temps de cerveau disponible à soi. Et on a besoin.

Oui, c'est facile, un inventaire, facile de dresser une liste, moins simple de s'y inscrire, d'abandonner ses impatiences et son désir de résultat (réconfort tangible du chapitre lu, de la page au net) pour s'amalgamer à sa chaise au centre des cris. S'en emparer, de ces lieux conçus on ne sait plus pourquoi, les épier au moins : le poste d'observation c'est l'urgence.

mardi

Connexions time out. Phishing. Spam. Relances. SP. Contrats. Notifications. Deadlines. Relectures. Corrections. Alarmes. Mails en attente. Réponses en retard. Pièces jointes. Fichiers partagés. Papiers. SOFIA. DEMANDE-NUART-VILLESOULE-VATEN-CAMEMBERT.xlsx. On pourrait s'en tenir à un genre de suite de mots-clés. Une liste. Épuisement d'un espace numérique. Sauf que là, au téléphone avec quelqu'un qui fait une étude des politiques publiques en matière d'aide à la publication numérique, je ne peux pas parler par mots clés. Il va falloir que je développe. C'est ce que je fais. On passe en revue l'histoire du livre numérique en France, ce que nous a permis de faire le CNL (puisque c'est cela que le bureau d'étude entend étudier), ce que nous souhaiterions faire, ce que nous ne pouvons pas (encore ?) faire. Il est sans doute assez juste de se dire, quand on est en position de demander une aide, quelle qu'elle soit par ailleurs, si nous n'avons pas la subvention, nous ferons quand même le livre. Tout le monde le fait peut-être, d'ailleurs. Ça doit nous aider à nous mettre en situation de monter des projets raisonnables même si, pour certains exemple récents (Empreintes par exemple), il est évident que sans soutien du CNL la viabilité du projet aurait été considérablement mise à mal : rien que pour le site, ce fut tout de même un an de travail. Plus proche de notre quotidien, pendant un moment, on se hype sur la possibilité d'un nouveau papier, qui s'appelle Groundwood.

À quoi ressemble-t-il ? Que pourrions-nous en faire ? Est-ce qu'il a un rapport avec les marmottes ? Non, je confonds avec Groundhog Day, le film où Bill Murray n'arrête pas de revivre la même journée. Nul risque que ça nous arrive. Mais le Groundwood, ce sera sans nous : nous apprendrons par la suite que c'est un papier disponible uniquement aux États-Unis.

mercredi

Relecture des épreuves du Faune Barbe-bleue. Des broutilles : inverser point et guillemet, césure, uniformiser l'expression EC22 Thixobody, vérifier sujettes, point manquant, uniformiser les heures. En voilà une idée, uniformiser les heures. Comment nous y prendrions-nous ? Pendant ce temps, plus de 230 notifications de catalogage de livres numériques viennent d'arriver dans nos boîtes mail. C'est la BNF qui termine de cataloguer le dépôt rétrospectif de notre catalogue (la période 2008-2017), comme convenu fin octobre lors de la mise en place de ce calendrier. Ensuite, en janvier, ce sera le premier dépôt du flux courant, avec L'homme heureux, ainsi que les parutions pour la période 2018-2019. Le Faune, lui, va voir sa couverture changer pour gagner en lisibilité. La maquette également va légèrement bouger. On est dans les derniers ajustements. Pendant mes pérégrinations de la journée, je passe à proximité d'une brocante avec beaucoup de livres d'occasion. Je regarde. Quelqu'un derrière moi soudain : oh ! de la poésie contemporaine ! Ce n'était même pas ironique.

 

jeudi

Aujourd'hui, je suis en retard. Mais je ne suis pas en retard qu'aujourd'hui. C'est un retard cumulatif. Je suis un peu plus en retard aujourd'hui à force de n'avoir pas jugulé le retard d'hier. C'est un truc temporel : quand on prépare son planning, on passe son temps à remettre à plus tard les trucs les moins urgents (quelque part c'est logique). Sauf que les trucs les moins urgents, ce sont toujours les réponses aux manuscrits refusés. Là, il faut donc prendre le temps et y revenir. Dire quelque chose d'un tant soit peu utile à chacun (du moins, essayer). Être cohérent (tâcher de). Et prendre les nouveaux arrivants dans la file car les manuscrits entrants, eux, ne sont jamais en retard. Que faut-il éviter quand on envoie un manuscrit ? De l'envoyer sans présentation du tout, voir sans message dans le corps du mail (ça nous arrive d'en recevoir ainsi, c'est un peu étrange un mail vide avec pièce jointe). De l'envoyer plusieurs fois à quelques jours voire quelques heures d'intervalle parce qu'on a fait une ultime micro-correction et qu'on veut renvoyer la dernière version en date. De l'envoyer en mettant en copie toute une flopée d'éditeurs de manière à ce que les adresses soient visibles par tous (on n'a pas franchement le sentiment d'être désiré dans ce genre de cas). D'envoyer plusieurs manuscrits d'un coup (sur le lot, il y en a bien un qui va passer ; non). De l'accompagner d'un commentaire désabusé du genre je sais que ce sera refusé mais bon ou lisez-le avant de le refuser (ça ne donne pas spécialement envie de le découvrir). De faire semblant de parler de nos livres pour motiver un envoi quand il est flagrant qu'on ne les a pas lus. De dire qu'on a étudié notre catalogue avant l'envoi (donc qu'on n'en a rien lu). Du coup, de nous envoyer quoi que ce soit sans avoir jamais lu ce qu'on propose. Liste non-exhaustive comme on dit, mais enfin c'est un bon début.

 

vendredi

On en est à ce moment dans l'année où je souhaite de bonnes fêtes à tout le monde à chaque fois que j'envoie un mail, peu importe le nombre de fois où je contacte la personne la même semaine ou la même journée. Bientôt, je souhaiterais aussi la bonne année vingt-quatre fois par jours. Je ne souhaite pas de bonnes fêtes dans mes refus de manuscrit, je me dis que c'est un peu délicat, et ça pourrait être mal perçu. Du coup, je ne dis pas non plus des trucs comme bonne journée dans ce genre de cas. Je suis donc un peu froid. Je m'en tiens en fait aux retours sur le texte. C'est très factuel. Dans tel message, je me retrouve à écrire mise en place d'une ambiance en peau de mots. C'est un lapsus. Je corrige. D'autres messages suivront. Beaucoup de réponses en retour : merci d'avoir répondu et argumenté, c'est tellement rare. Ça ne devrait pas.